On parle beaucoup du phénomène de « quantitative easing » (QE) (ou « assouplissement quantitatif » en français) qui n’est rien d’autre qu’une version « améliorée » de la « planche à billets » : avec 80 milliards de dollars déboursés par mois par la FED (réserve fédérale américaine) pour acheter des bons du Trésor américains, soit 1250 milliards en 12 mois, et même plus de 4 000 milliards en 5 ans, il est légitime de se poser la question de son utilité.
Car logiquement, cette manière de procéder devrait faire perdre de la valeur au dollar vis à vis des autres monnaies : c’est une sorte de dévaluation.
Pourtant, tous ces milliers de milliards injectés par la FED n’ont dans la réalité que très peu d’incidence sur la valeur du dollar, tandis que les bourses continuent de monter sans raison apparente : on sait que lorsque le « QE » cessera, alors le système financier dans son ensemble s’écroulera.
Pourquoi l’effondrement annoncé n’arrive-t-il pas, voilà la question que je me pose depuis un petit moment. Et j’ai enfin ma petite idée sur le sujet :
c’est qu’en réalité l’argent mis dans le circuit ne redescend pas jusque dans l’économie « réelle » (comme si on jouait à un autre « jeu » avec de « faux » billets), ce qui permet d’une part de ne pas faire perdre de la valeur à cette monnaie (puisque la valeur des objets n’est pas corrélée dans l’économie réelle à celle qu’elle devrait avoir si tous ces « billets » étaient mis en circulation), et d’une autre de laisser aux marchés (et donc aux investisseurs) l’illusion de la confiance : même si chacun est prêt à tout vendre aux premiers signes de l’effondrement (et accessoirement à l’amplifier), ils continuent de gagner de l’argent.
Car quand tous ces milliards se trouveront « relâchés » par les bourses, la dévaluation du dollar sera catastrophique, et tous les pires scénarios économiques se réaliseront alors : tous ceux qui possèdent quelque chose « en vrai » verront la valeur de leurs biens fortement réduite.
C’est cela que la règle du capitalisme impose, l’autorégulation des marchés doit remettre in fine les choses dans l’ordre. Et c’est cette même règle fondamentale que transgressent actuellement les économistes avec ce « quantitative easing », en empêchant consciemment au système de « faire sa purge ». Car cela signifierait prendre ses pertes, et pour certains payer la facture.
Il faut maintenant envisager les conséquences de la planche à billets dans le monde réel :
- pour les riches, ils risquent gros. Leurs bien valent moins, et ils peuvent désormais acheter moins avec la même somme (en valeur nominale)
- pour les pauvres, ceux qui n’ont rien ne perdront pas beaucoup, tandis que ceux qui ont des dettes leur valeur baissera aussi.
Sauf qu’avec le « QE » (et c’est à ça qu’il sert), la FED maintient le système financier dans une sorte de « coma artificiel » qui donne du temps… Du temps aux très riches pour se sortir de ce bourbier, du temps aux « aventuriers » pour se faire encore plus d’argent, et surtout du temps pour laisser ceux qui seront restés (classes moyennes supérieures d’abord, petits épargnants ensuite), payer pour eux la facture.
Cela explique aussi pourquoi les banques ne prêtent plus : elles savent que lorsqu’elles sauteront, les endettés ne le seront plus ; tandis que les petits et moyens épargnants paieront pour les autres.
Ce sont donc bien les classes moyennes, jusqu’aux « supérieures », qui vont donc payer le plus. Les pauvres eux, survivront, comme ils l’ont toujours fait.
Maintenant, mesdames et messieurs qui vous croyez riches et qui pensez défendre vos propres intérêts « de classe » selon les « lois » du capitalisme, vous qui pensez que votre épargne fait de vous un possédant au même titre que ceux-là même qui veulent vous le faire croire, sachez que ces lois sont truquées et que vous êtes les prochains sur la liste. A votre place, je réfléchirai à deux fois avant d’aller déposer un bulletin dans l’urne : car quoi que vous fassiez, vous serez perdants. Comme nous.
Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr
20 novembre 2013 à 1:06
Analyse intéressante répondant avec logique à certaines des questions que moi-même me posait.
En fait, ce qui me préoccupe réellement c’est ce qui surviendra après cet effondrement, effondrement que chacun attend et redoute, parfois même appelle de ses vœux.
L’état de glaciation mental que la pensée purement économique a produit et qui s’est progressivement étendu à l’ensemble des peuples mondiaux depuis au moins un siècle a gelé les esprits à un point tel que des chercheurs internationaux ont découvert une baisse moyenne du Q.I. des occidentaux de 14 points depuis un siècle (époque où, selon moi, commença le processus d’obscurantisme dont nous voyons aujourd’hui les effets).
Cette pensée purement économique, que j’appelle l’économisme dogmatique, entend autant les trois étapes droitières économico-libéral: bourgeois, capitaliste puis, aujourd’hui, néolibéral, que de ses trois composantes de gauche: sociale-démocratie, socialiste et communiste (les extrêmes droites n’étant que les poubelles des délaissés historiques).
Ces trois dernières s’étant développées en réaction à la toute puissance déployé par les premières.
C’est pourquoi je pense qu’il nous faut redéfinir autant la démocratie que la place réelle de l’économie au sein des sociétés.
Bien à vous.
10 janvier 2014 à 13:56
En faisant la même hypothèse d’un crash boursier mondialisé et d’une hyperinflation avec effet domino, j’ai imaginé ce qui se passerait le lendemain de l’effondrement boursier sous forme de roman de politique fiction. Voir: « Le Porte-Monnaie, une société sans argent » Editions Libertaires, mai 2013 (détail sur mon blog). JFA.