J’avais commencé un article sur les « trolls » et le « flaming« , suite à une émission dans laquelle monsieur Emmanuel Todd était accusé de « complicité » avec madame Marine Le Pen. Victime à son tour de ce qui ressemble de plus en plus à un sabotage organisé de la parole iconoclaste en matière de politique économique, je m’apprêtai à dénoncer une théorie du complot dirigé contre ceux qui luttent (ou semblent vouloir lutter) contre la pensée unique… Sauf que le problème n’est pas si simple :
car dans la période de crise que l’Europe traverse ce ne sont pas seulement deux camps qui s’affrontent mais bien plusieurs tendances dont il est difficile de définir clairement les frontières.
Tout d’abord il faut revenir au positionnement idéologique de chacun des protagonistes :
-L’UMP désire clairement le sauvetage de l’Europe par l’instauration de l’austérité générale, avec baisse de la protection sociale, baisse des salaires et hausse des taxes sur les ménages, etc…
-Le PS est tiraillé entre son électorat qui veut taxer les riches et son pragmatisme économique qui conduit à l’austérité mal affirmée, mais désire lui-aussi le sauvetage de l’Europe à tout prix.
- Tous ceux qui luttent à la fois contre le PS et l’UMP sont donc « naturellement » accusés par ceux-ci de faire cause commune à travers leurs virulentes critiques contre la politique économique menée par l’un ou l’autre de ces deux partis ; et c’est peut-être là que commence le « confusionnisme » dont se servent les trolls et les « flameurs ».
Le confusionnisme, si j’ai bien compris le sens de cette accusation, serait de défendre à travers un discours apparemment d’extrême-gauche les positions de l’extrême droite, ce qui serait susceptible de faire naître la confusion entre ces deux entités opposées. A ce confusionnisme (qui lui-même fait suite à l’accusation de « complotisme » ou de « conspirationnisme » que subissent tous ceux qui remettent en cause la version officielle du « onze septembre ») s’ajoute désormais une autre qualification : le « rouge-brunisme », dont les acteurs (les « rouges-bruns ») seraient en quelque sorte des agents infiltrés à l’extrême-gauche pour insinuer le confusionnisme…
Mais qu’importe : c’est en voulant rechercher à qui peut bien profiter ce « complot » qu’on se perd, car hors mis le mépris commun de « l’UMPS » par les deux extrêmes, il est difficile de leur trouver des points communs ; en politique, les ennemis de nos ennemis ne sont pas toujours nos amis !
En y réfléchissant un peu (quand même !), il y a le point épineux de la politique de la France dans la crise et par rapport à l’Europe. Sur ce sujet c’est effectivement la confusion qui s’impose, car les analyses de l’extrême-droite et de l’extrême-gauche semblent converger au premier abord : il y a un problème avec l’Europe. Mais seulement sur le diagnostic, car sur les solutions leurs avis divergent fortement… enfin en apparence aussi. Et c’est sans doute là que le bât blesse. Et aussi que les « trolls » nous disent peut-être quelque chose qu’ils ressentent disons… confusément. Car même si l’extrême-gauche désire une « autre » Europe plus solidaire quand l’extrême-droite veut « moins » d’Europe, les solutions induites par ces deux choix se fondent en réalité sur un seul et même modèle, le capitalisme.
Et c’est là que se trouvent coincés nos chers économistes alternatifs « de gauche » : ils se cognent de plein fouet à l’idéologie capitaliste, qui en temps de crise conduit inévitablement au protectionnisme puis au nationalisme -qu’il soit européen ou non. Car comment faire autrement ? A partir du moment où l’on s’accorde sur le fait que le capitalisme ne sauvera pas tout le monde sans vouloir changer de modèle, il faut bien choisir : et que ce soit à droite comme à gauche (extrême ou pas), un consensus se dégage pour dire qu’il vaut mieux sauver ses fesses (ou celles de son pays) plutôt que celles du voisin… Sauf que si cette conception sied à la droite comme à la gauche « classiques », elle rentre pour ce qui est de l’extrême gauche en contradiction totale avec ‘l’internationalisme » qui fonde son idéologie.
C’est à cette absence d’alternative idéologique d’une « vraie » gauche (comment en effet protéger les Français des licenciements boursiers tout en désirant le développement des autres nations qui font justement concurrence à ces même Français, le tout à l’intérieur du cadre capitaliste ?) que s’attaquent les trolls bien avisés pour mettre en lumière le flou de leurs propositions : si l’on se place d’un point de vue économique, les positions de l’extrême-droite et de l’extrême gauche aboutissent au même point, par des chemins différents. Le cadre réflexif dans lequel se fondent toutes les propositions politiques est absolument capitaliste, et les solutions employées pour sortir de la crise sont donc exclusivement économiques : comment pourraient-elles aboutir à une solution sociale, alors même que le capitalisme lutte contre le social ?
A partir du moment où même les partis de gauche continuent à croire aux vertus du capitalisme, les trolls et autres flameurs continueront eux-aussi à faire converger deux conceptions opposées qui se mélangent et se rejoignent dans le capitalisme. Cela devrait nous inciter à la réflexion : une alternative « post-capitaliste » ?
Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr
7 février 2013 à 22:00
Merci Caleb pour ce texte -
( j ‘ en profite pour dire que j ‘ apprécie le + souvent ce que tu dis-écris , que tu te distancies bien des événements , savoir ce que nous , nous voulons )
En l ‘ occurrence , notre refus de l ‘ économie admise , l ‘ économie capitaliste , et + encore , quelle économie nous voulons !
Je lis sur des commentaires d ‘ autres textes , certains qui se posent la question de savoir si ce travail doit être fait avant , ou après une prise de pouvoir !
Il ne s ‘ agit pas de se voiler la face : que ce soit avant ou après la prise de pouvoir , ce travail devra se faire , et il faudra le faire VRAIMENT !
Rien n ‘ empêche de le commencer maintenant tout en cherchant à prendre le pouvoir -
( il s ‘ agit peut-être moins de constituante que de constitution )
Mais qui veut vraiment d ‘ une économie autre que l ‘ économie capitaliste ????
Peu importe que nous ne soyons 10 , cent , 1000 ou plus ! Il nous faut trouver cette solution : cette économie de partage , non-capitaliste , et cette prise de pouvoir !
Il nous faut accéder au monde que nous désirons et que nous aimons !
14 février 2013 à 15:13
@ monde indien
exactement !
10 février 2013 à 20:27
Le capitalisme n’est pas une cause et il ne sert à rien de le vilipender. Il est une conséquence de la tendance naturelle à épargner et à vouloir préserver son épargne contre les risques d’inflation, donc à la faire fructifier en spéculant : à « placer son épargne ».
A ce petit jeu, l’épargne produit des revenus qu’il suffit de bien placer pour entraîner un effet de « boule de neige ». Plus l’épargne placée est importante, plus les organismes financiers s’y intéressent et plus elle produit et grossit, évidemment.
Des placements, il y en a de toutes natures, dans l’immobilier, dans les produits financiers (autrement dit le crédit) ou dans l’investissement productif (autrement dit le travail).
Le problème actuel de beaucoup de pays, dont la France, est que les placements de l’épargne se sont dirigés vers l’immobilier et les produits financiers, plus rentables car les marchés correspondants se manipulent facilement.
Résultats : manque d’investissement productif donc chômage, manque de production donc importations payées à crédit pour procurer une consommation de qualité décevante, revenus de plus de la moitié de la population dépendant directement ou indirectement de l’endettement étatique. Pour rembourser les crédits aux échéances, il ne reste qu’à vendre les biens nationaux aux étrangers créanciers, les entreprises en particulier (Arcelor ou Alcatel pour prendre deux exemples parmi une foultitude) car leur savoir-faire les intéressent. C’est ce que les guignols appellent « attirer les capitaux étrangers ».
Et puis arrive le moment où les étrangers rechignent à prêter leur épargne parce que ce qui reste à vendre ne les intéresse guère, il y a mieux et moins cher ailleurs en termes de compétence. Ils risqueraient de ne pas pouvoir se rembourser sur la bête.
Pour supprimer le capitalisme, il suffirait donc de supprimer l’épargne, par les impôts et prélèvements obligatoires par exemple, mais il y a de la résistance.
Les gros épargnants mettent depuis longtemps leur épargne ailleurs et elle fait ses petits ailleurs. Elle se dirige encore moins vers des investissements productifs chez nous. La machine productive s’étouffe peu à peu, c’est ce que l’on appelle la désindustrialisation.
Pour tuer le capitalisme, si c’est l’objectif, il faut d’abord tuer le crédit ce qui supprimerait les placements financiers et immobiliers. Mais il est difficile de se passer de crédit quand on vit au dessus de ses moyens, avec des exemples qui viennent de très haut.
La dette publique, c’est maintenant presque deux fois le PIB. Il faut encore vendre pas mal de richesses nationales pour payer les échéances !
Ce n’est pas en supprimant les investissements productifs que les pays endettés pourront se sauver. Le principal problème, alors, réside dans le fait que, quand on investit dans la production, ce n’est qu’au bout d’un certain nombre d’années que les résultats apparaissent, et seulement si l’on a bien placé ses liquidités (d’où qu’elles viennent) ce qui n’est pas gagné d’avance.
14 février 2013 à 15:22
@ Esope
Je suis d’accord avec babelouest : l’épargne est un mode de fonctionnement typiquement capitaliste. L’épargne n’est pas l’économie, c’est un calcul financier destiné à faire du profit. On peut économiser du blé si on craint un hiver difficile, mais on ne l’épargne pas pour attendre que les prix montent afin de le revendre plus cher. Ce n’est pas le même raisonnement. La volonté de « prévision » des hommes face aux incertitudes de l’avenir sont justement une conséquence du capitalisme, en ce sens qu’en créant la rareté sur laquelle ce système est fondé il crée de fait les conditions de l’incertitude.
Il n’y a pas que le partage des richesses qui est à remettre en cause, il y a aussi le mode de fonctionnement de nos sociétés, à savoir les modes de production et de fabrication, ainsi que les valeurs qui encadrent cette manière de fonctionner.
13 février 2013 à 8:25
Bien entendu Esope, si l’on veut vraiment faire une économie de partage, le PROFIT devra devenir hors-la-loi. Donc les discours sur l’épargne, bien entendu, ne tiennent pas. C’est toute une gymnastique nouvelle à se mettre dans l’esprit. Car qui dit plus de profit, dit plus de dette. Les grippe-sous vont sauter au plafond de rage.Ce sont presque mille ans de pratique bancaire qu’il faudra gommer.
13 février 2013 à 19:37
C’est quoi le partage ?
C’est que tous travaillent et se partagent les fruits du travail, n’est-ce pas ?
Que faudra-t-il produire pour que la consommation soit globalement équilibrée, avec quelle quantité et répartition de produits ? Avec quels moyens et quelles ressources naturelles ? Comment le travail va-t-il être distribué ? Par qui? Qui va se charger des tâches ingrates et qui va se réserver les tâches gratifiantes ?
Comment ceux qui ne peuvent pas travailler pour de bonnes raisons profiteront-ils du travail des autres ? Comment ceux qui sont nés fatigués, avec plein de poil dans la main, seront-ils traités ?
Ce n’est pas seulement une gymnastique nouvelle à se mettre dans l’esprit, c’est avoir tout un tas de réponses incontestables à tout un tas de questions incontournables.
Pour avoir un début de crédibilité, il faut au moins avoir un début de réponse aux questions ci-dessus, … entre autres.
A vous de jouer.
14 février 2013 à 15:48
@ Esope
Le partage, c’est que chacun fasse selon ses capacités et reçoive ce dont il a besoin.
Pour que la consommation soit globalement équilibrée, il ne faut pas seulement produire suffisamment (nous gâchons plus de la moitié de ce que nous produisons en nourriture !), il faut pouvoir donner à tous ce dont ils ont besoin : c’est la recherche du profit qui empêche de le faire
Pour les moyens et les ressources naturelles, nous avons suffisamment de bras valides (quand on voit le nombre de chômeurs !) pour travailler, et la terre, si elle est bien utilisée, est largement suffisante pour produire éternellement. Sans compter les surfaces gigantesques et exploitables des océans, et l’avancée technologique.
Le travail doit être distribué de manière à ce que chacun fasse ce qu’il lui plaît de faire, car on ne fait bien que ce que l’on aime. En attendant que les tâches pénibles soient remplacées par des procédés techniques les rendant obsolètes (que d’heureux ingénieurs à poils dans la main pour le ramassage des ordures auront développé), chacun fera à tour de rôle ces tâches pénibles mais demandant peu de compétences.
La technologie se développant, des « supercalculateurs » feront correspondre les ressources avec les besoins, l’objectif ne sera plus le rentable mais l’utile. Ceux qui ne peuvent pas travailler « physiquement » feront de « l’intellectuel » et vice-versa, ceux qui ne peuvent rien faire ne feront rien ! les fainéants n’existent pas, tout le monde s’ennuie s’il sait qu’il n’aura rien à faire d’autre que s’ennuyer jusqu’à la fin de sa vie…
Juste un début de réponse, mais il faut quand même faire un peu de gymnastique !
13 février 2013 à 12:57
L’économie de partage, sans le profit, n’est pas cohérent s’il s’agit d’une solidarité de clocher, d’une solidarité au niveau national ou continental.
Toute alternative post-capitaliste doit être universelle, sinon il s’agit à nouveau d’une solidarité entre dominants, que ce soient des pays riches, des individus riches, ou des institutions internationales les réunissant.
Mais comment gommer mille ans de pratique bancaire capitaliste, dix mille ans de pratique agraire capitaliste, cent mille ans de préhistoire capitaliste, et des millions d’années de pré-hominidés et hominidés capitalistes, où les dominants se sont toujours appropriés les meilleurs morceaux, qu’il s’agisse de silex, de cavernes, de bisons, ou de femmes ?
Comment éviter aussi que les utopies les plus généreuses ne se transforment en dystopies sinistres, comme tout ce qui a été tenté jusqu’à présent ?
Il n’est pas si loin le temps où l’union des travailleurs de tous pays fit trembler les capitalistes de tous pays, pour aboutir à un système au moins aussi inégalitaire, et beaucoup moins efficace, matériellement du moins. Spirituellement, les religions sont aussi efficaces que les idéologies… surtout en s’associant avec le pouvoir temporel dominant…
Peut-être ferons-nous mieux la prochaine fois ?
Mais, comme le disaient Esope, Charles le téméraire et Guillaume le Taciturne, « point n’est besoin d’espérer… »
14 février 2013 à 15:33
@ Agequodagix
évidemment, la situation n’est pas idéale et les exemples historiques sont malheureusement contre nous. et effectivement, il semble que la « société future » sera mondiale, que ce soit dans la démocratie ou sous la dictature. Mais doit-on s’arrêter là, ou quand même tenter « autre chose », en essayant au moins de ne pas reproduire les mêmes erreurs que nos aînés ?
Si par exemple on supprimait l’argent, purement et simplement, que se passerait-il ? Comment organiser la vie, les échanges, la production, la société ; quels seraient les avantages et les inconvénients, comment parer aux difficultés rencontrées, voilà ce à quoi je voudrais qu’on réfléchisse au moins… Si telle ou telle voie est sans issue, nous pourrons bien alors nous payer notre troisième petite guerre mondiale à l’ancienne, ça nous fera toujours du boulot pour reconstruire… et puis nous avons l’habitude… Non ?
14 février 2013 à 17:17
D’où ce court essai que j’ai remis à jour il y a deux mois.
Ce n’est bien entendu qu’un canevas, susceptible d’améliorations, voire d’options parfaitement différentes : il a seulement le mérite d’exister.
17 février 2013 à 10:09
@ babelouest
Ton « essai » est une base intéressante, c’est sur ce genre de projet que j’aimerais voir se pencher nos « têtes pensantes »… J’ai quelques éléments à rajouter ou à discuter, peut-être sera-t-il bientôt temps de s’y mettre sérieusement ; faut d’abord pour ma part que je finisse quelques uns de ceux que j’ai déjà en cours ! mais pour moi l’objectif « ultime » de la réflexion sur la société revient à inventer le genre de société dont tu fais la description. il faudra trouver un moyen et un espace pour permettre à d’autres d’en discuter plus avant. on en reparlera.
15 février 2013 à 5:45
@esope
le capitalisme n ‘ est malheureusement pas – que – l ‘ épargne et s ‘ assurer de sa protection : il ne s ‘ agirait alors que d ‘ une simple capitalisation et de sa protection –
mais c ‘ est bien dans le « isme » de capitalisme que se situe l ‘ effet boule de neige dont tu parles , par l ‘ investissement , et qui permet de créer les cavernes d ‘ Ali-baba que nous savons – celles constituées par les 40 voleurs , car il ne s ‘ agit plus d ‘ épargne rassurante mais bien de la constitution de « trésors » ( ??? ) , dans la main-mise sur le bien commun , le produit du travail collectif – Les 40 voleurs sont conscients de leur dévastation , sans foi ni loi – ( bien + que les bienheureux qui ont un poil dans la main !!! )
S ‘ il est indispensable de continuer à démonter les mécanisme de leurs méfaits , de continuer à organiser nos luttes et l ‘ avènement de ce que nous souhaitons , tu as raison de dire qu ‘ il nous faut trouver les tas de réponses incontestables aux questions incontournables :
pour avoir un début de réponses , il faut commencer – Alors commençons , et pas « à vous de jouer » , à toi aussi –
Monde Indien –
http://mondeindien.jimdo.com/
15 février 2013 à 10:02
OK
Le terrain de jeu est vaste.
Pour produire et partager de manière équilibrée, il faut être conscient des besoins des autres, des capacités des autres et des ressources dont ils disposent. Ce doit être connu sur des bases réelles, non pas en des termes de valeur affectée en monnaie manipulée à des fins spéculatives par des marchés (qui ne sont que des lieux de confrontation de pouvoir, dans une recherche égocentrée de « toujours plus »). Ce doit l’être sur des critères concrets et utilisables de façon pratique.
Cela soulève d’emblée plusieurs problèmes.
1 – Un énorme problème de regard sur « les autres ». Nous sommes tous pris dans une réalité de concurrence darwinienne. Les autres sont des concurrents sur un territoire limité en ressources. En voir certains comme des partenaires n’est possible (d’après tous les constats) qu’avec l’esprit d’une équipe mobilisée contre « d’autres ». Ranger certains autres sous une étiquette en « -isme » c’est d’emblée entrer dans ce jeu de concurrence.
2 – Un énorme problème de communication. A l’heure actuelle, semble-t-il, le média le plus performant pour une communication mondiale (ou nationale) est internet. 80% de sa capacité est consacrée à des échanges dont la motivation de base est le sexe. C’est un domaine où, pourtant, le besoin de proximité est manifeste et où le média en question ne peut nourrir que des fantasmes. La communication organisée à grande échelle (il y a bien d’autres exemples) est tellement manipulée et farcie de fantasmes qu’elle n’offre aucune garantie d’objectivité.
3 – A supposer que les humains puissent se coordonner directement, ce qui est possible à une toute petite échelle, la famille ou le voisinage par exemple, cette coordination ne peut porter que sur des productions et des consommations en autosuffisance, avec des ressources locales. Comment se coordonner directement avec tous les producteurs dont nous consommons aussi les productions, en appréciant objectivement leurs besoins et les caractéristiques précises de leurs productions ? Vivre en autosuffisance sur un petit territoire, avec des ressources locales, conduirait à abandonner une grande partie de ce que nous considérons comme un minimum de confort absolument indispensable.
J’arrête là pour l’instant car le terrain est tellement vaste …
Déjà, sur le premier point, j’ai une proposition de début de solution : supprimer du vocabulaire tous les mots en –isme et -iste.
15 février 2013 à 14:56
@ Esope
1. Des âges d’or ont existé, par exemple dans l’Egypte ancienne entourée de déserts presque infranchissables, dans le surpuissant empire du milieu derrière sa Grande Muraille, dans des îles vouées aux arts martiaux et isolées, comme le Japon. On s’y consacrait aux arts, à la pensée, aux sciences, aux dieux et au culte de la personnalité tutélaire toute puissante qui permettait cet âge d’or. On n’y constatait plus, temporairement, « l’esprit d’une équipe mobilisée contre « d’autres »».
2. Pour les choses importantes, il faudra en revenir aux missives par porteur calligraphiées à la plume, sur papier de chine et à l’encre dito.
3. Par ailleurs, admettre que les besoins des autres sont équivalentes aux nôtres aboutira soit à une surexploitation de nos ressources terrestres, soit à une réduction considérable de ce à quoi nous fûmes accoutumés !
15 février 2013 à 17:32
Bien sûr Agequodagix, il est parfaitement logique qu’une nouvelle donne corresponde à une réduction de nos besoins, en déplacements, en mets recherchés, en gadgets, en palais princiers, en hôtels, restaurants, avions, toutes choses apportées par une vie aux goûts biaisés et aux envies de choses inutiles ou superflues.
16 février 2013 à 1:12
Et si nous vivions dans un monde cruel où les pays les plus inégalitaires, qui accèderaient à la satisfaction de leurs « besoins, en déplacements, en mets recherchés, en gadgets, en palais princiers, en hôtels, restaurants, avions », étaient aussi ceux dont le biais vital et l’envie de choses inutiles ou superflues était le plus récent ?
Et si ces pays inégalitaires et émergents n’avaient aucune intention de réduire aucun de leur besoin inutiles ou superflus, s’ils ont l’impression que par un retour de balancier, ils s’apprêtent à goûter ce que nous n’aurons plus les moyens de nous offrir ?
Et si nous appelions « nouvelle donne » une inévitable réduction de nos moyens, que nous voudrions imposer aux autres pour préserver les nôtres ?
Et si leur croissance matérielle leur permettait à la fois le luxe d’une société très inégalitaire et d’une croissance des revenus moyens inimaginable chez nous ?
16 février 2013 à 21:51
Un jour ou l’autre, ces pays « émergents et inégalitaires » seront eux aussi pris dans l’engrenage d’une croissance infinie dans un monde fini, et eux aussi se heurteront au mur. Ce n’est qu’une question de temps.
16 février 2013 à 23:45
@babelouest
C’est juste une question de temps, quelques générations :
- une génération pour mettre en place leur dispositif (les BRICS sont déjà en plein dedans),
- une génération pour jouir de leur supériorité, à notre exemple récent,
- une génération pour s’apercevoir que cela ne marche plus si bien,
- une génération pour décliner en pensant encore pouvoir s’en sortir,
- une génération pour sombrer en finissant le saccage de la planète pour essayer de maintenir leurs habitudes de consommation.
Il nous suffit donc d’attendre, mettons 100 ans, peut-être un peu plus, pour que toute l’humanité se trouve finalement engagée dans le processus déjà expérimenté dans l’île de Pâques, il y a quelques centaines d’années, et aboutissant à un nombre réduit d’habitants, survivant misérablement, dans un univers écologiquement dévasté, en ayant perdu toute mémoire de leur antique civilisation.
En attendant cet âge béni, que feront les « émergents », en surnombre et tout puissants, avec les gentils « décadents » précurseurs ?
Je pense qu’ils les mettront en cage pour ne pas être dérangés chez nous par nous.
17 février 2013 à 10:36
@ Agequodagix
c’est pour éviter les conséquences de vos trois points qu’il est difficile de ne pas envisager les choses sous un angle « mondial ». Aucun pays ne peut sur le long terme se passer des relations avec les autres, que ce soit culturellement, technologiquement ou au niveau des ressources. Cela pose question sur la définition de civilisation : y en a-t-il plusieurs ou une seule ? faut-il tendre vers le « moins » pour tous ou le « plus » pour tous ? Et l’utopie de babelouest ne permet-elle pas ce « plus » ? (ou peut-être le « mieux » serait un terme plus adapté)
Mais a priori (puisque nous sommes en Utopie), rien n’empêche de vouloir le beurre et l’argent du beurre (sans compter le « reste » :) !)
17 février 2013 à 10:21
@ Esope
Il y a effectivement un problème d’éducation et un problème de communication. Le premier se règle par la confrontation à la réalité : la misère engendrée par le « retournement du capitalisme » et la crise qui s’ensuit chez les « développés » prouve clairement à ceux qui en doutaient (les fameuses classes moyennes qui se croyaient du côté des privilégiés et qui s’aperçoivent peu à peu qu’ils sont en réalité les véritables victimes de la crise) que le système capitaliste ne favorisera JAMAIS l’intérêt général. Le second trouve actuellement les limites de son utilisation et internet doit se métamorphoser pour devenir un véritable outil de contestation, de réflexion ET de rassemblement. A grande échelle cette fois.
Pour ce qui est de la mise en rapport de la production et de la consommation, les technologies actuelles (http://calebirri.unblog.fr/2011/12/12/de-la-crise-a-la-singularite-technologique-en-passant-par-azimov/) permettent certainement de le faire si l’on veut bien supprimer la « rentabilité » comme valeur supérieure à toutes les autres valeurs. Le terrain est vaste, mais le jeu n’en vaut-il pas la chandelle ?
15 février 2013 à 14:29
Un canevas, même utopiste, susceptible d’améliorations, voire d’options parfaitement différentes a certainement le mérite d’exister.
C’est une base et éventuellement un but.
L’utopie de Babelouest est parfaite pour tous ceux qui sont sensibles au sentiment d’appartenance à une communauté territoriale laïque « à la française ».
Elle apparaîtra comme une utopie inquiétante pour ceux dont les appartenances communautaires sont extraterritoriales, qu’elles soient fondées sur des sentiments d’appartenance d’ordre religieux, spirituel, intellectuel ou affectif.
Elle est une dystopie terrifiante pour les solitaires cherchant à vivre librement en marge de toute communauté organisée.
17 février 2013 à 10:30
@ Agequodagix
je ne crois pas que l’utopie de babelouest puisse « empêcher » les « solitaires » de vivre selon leurs volontés ; en tous les cas pas plus que le système capitaliste empêche les « non-capitalistes » de faire selon les leurs : il y a des trucs à faire pour « la société » (payer ses impôts, son loyer, sa nourriture, trouver un travail « alimentaire »…), libre à vous de ne pas en faire plus. Encore que j’ai du mal à croire que les « obligations » communautaires envisagées par babelouest prennent autant de temps et d’énergie que de satisfaire aux exigences du capitalisme lorsqu’on n’est pas « dans la partie »…
Et puis vous avez vu : les « déviants » seront ostracisés : si les solitaires sont des déviants, alors justice leur sera faite en… les laissant seuls !
17 février 2013 à 12:04
Il est certain que le type de communauté que je propose ici (sans obliger à suivre de A à Z ce schéma) incite, et à mon avis cela ne peut justement n’être que bénéfique, à mettre de côté ces notions dépassées que sont les racismes, les intolérances religieuses ou les sectarismes du genre « les anciens commandent » (Amish) ou « haro au darwinisme » comme on en voit se développer aux USA. C’est également totalement incompatible avec les castes indiennes. C’est précisément une proposition pour dépasser ces véritables archaïsmes prétextes à conflits.
L’humain est un animal social. Bien sûr celui qui veut rester solitaire, le peut. S’y tiendra-t-il, sans interférer avec ceux qui ont préféré rester en commun ? J’ai quelques doutes.