Pour quoi je paye ?

Il n’y a rien à faire, je ne comprends toujours pas. Et même de moins en moins. La bourse, le chômage, le nucléaire iranien, le réchauffement climatique, le racisme, le pouvoir, tout cela est pour moi fatalement lié au système qui les provoque, car à chaque fois que je tente de m’expliquer le mystère d’un phénomène, ma réflexion me conduit inévitablement vers cette seule explication, qui me semble convenir à la logique.

Je ne suis pourtant pas le seul à entrevoir les choses ainsi! Et pourtant, malgré l’augmentation de la contestation face à cette situation,  rien ne semble devoir changer un jour. Bien sûr quelques nouveaux partis vont se créer, quelques grandes manifestations vont se produire, quelques personnalités vont surgir pour la postérité, et peut-être même quelques mesures seront-elles prises, mais en définitive rien qui puisse enrayer la marche des évènements.  Tous continueront, seuls ou en groupes, à colporter leur bonne parole à qui veut bien les écouter. Tous s’investiront dans une quête au conformisme ambiant, de mauvaise grâce au début, mais en pliant à force de compromis, voire de compromissions. Car se faire élire c’est accepter les règles. Manifester, c’est suivre les règles. Se mettre en avant, c’est oublier les règles. Modifier les règles, c’est quand même jouer au même jeu.

La majorité des êtres humains, qu’ils soient dans l’élite sociale ou non, et moi comme les autres, sont tellement conditionnés par le système qu’il a fini par atteindre jusqu’à notre conscience collective. Ce système qui nous fait croire que rien ne peut changer, que tout a toujours été comme ça, et doit l’être pour toujours. Cette grande machine (le capitalisme donc) que l’homme a construit au fil des âges semble avoir rompu ses liens, et personne n’a l’air de vouloir l’arrêter… mais ceci est une illusion. Ceux qui tiennent les rênes du système sont des démiurges qui ont usurpé notre place en nous faisant croire que nous n’avions ni la force ni le savoir pour le faire. Il suffirait pourtant de se réveiller pour que cesse cette illusion.

Pour arriver jusqu’à ce constat, il n’est nul besoin d’aller très loin, mais juste de se poser cette question simple : « pour quoi je paye ? »

c’est alors en tentant d’y répondre qu’on reste stupéfait, comme tente de le démontrer cette petite liste, bien entendu non exhaustive… :

Je paye des taxes sur les produits que j’achète, qui retournent à l’Etat, ainsi que la marge bénéficiaire du commerçant, et de tous les intermédiaires.
Je paye des impôts pour la construction et l’entretien des routes, l’acheminement de l’eau ou de l’électricité… malgré le fait que je paye également les péages,  mon eau et mon électricité.

Je paye la taxe d’habitation, la taxe foncière si j’ai la chance d’être propriétaire, la redevance…qui servent à financer les chantiers privés, la construction des écoles où l’on conditionne, ou que sais-je encore.

Je paye des taxes sur mes salaires pour la retraite que je ne pourrai pas prendre car je serai mort avant, pour des chômeurs qui ont de moins en moins de droits, pour un service public qui licencie à tour de bras, pour une police qui renvoie les étrangers chez eux ou accompagne le gouvernement qui se protège de son propre peuple.

Je paye une assurance qui se débrouille toujours pour n’assurer que ce qui ne vous arrive jamais, mais jamais ce qui vous arrive.

Je paye aussi pour réparer les erreurs des banques, celles qui nous obligent à travailler plus et plus longtemps.

Je paye un passeport biométrique qui servira à me tracer, des diagnostics « bâtiment » m’obligeant à faire des travaux, une carte bancaire m’autorisant à payer des agios…

Je paye pour tout et tout le temps, et aussi pour rester pauvre et ignorant. Je paye pour rester dans la partie, pour ne pas que je réfléchisse à autre chose que « comment faire pour payer ? »

Et je paye enfin pour enrichir les riches, pour le train de vie de l’Etat, pour la politique qu’il mène,  la construction des centres de rétention, des armes, des voitures qui polluent, pour l’exploitation intensive des ressources,  cultiver des OGMs, fabriquer des nanoparticules, arnaquer les pauvres, pour avoir l’air riche, ou important, instruit ou beau…

En réalité, on comprend pourquoi l’argent est si puissant  lorsqu’on s’imagine sans lui. Car c’est un gouffre pour l’imagination! Cela tétanise : que ferions-nous sans lui ? comment nous entendre, nous parler, échanger, créer, construire ? Voilà le point central de toute cette illusion, la clef de voûte de cette vaste supercherie qui veut nous faire accepter l’état de ce monde comme inéluctable. Car l’indépendance est le pire ennemi du pouvoir : sans l’esclave le maître n’est rien. Et l’argent rend dépendant. A partir du moment où le pouvoir et l’argent se sont liés, la dépendance est devenue totale.

C’est qu’il est très difficile aujourd’hui de s’imaginer un monde fonctionnant sans argent. Il est actuellement impossible à quelqu’un de prétendre vouloir vivre sans argent, à moins que de se vouloir misérable : celui qui compterait vivre correctement sans argent ne le peut pas. L’argent est comme une drogue qui nous aurait rendus accros, en ce sens que nous ne sommes plus capables d’envisager la vie autrement qu’avec lui. Le pouvoir, en quelque sorte, nous en a rendu dépendant, comme avec le crédit, et le renouvelable… le fournisseur est le pouvoir financier, le dealer le pouvoir, les drogués le peuple. Par cette dépendance le pouvoir a pris un ascendant psychologique (il possède l’éducation, la télé, la pub, la presse….) et nous entraîne vers l’acceptation de notre faiblesse vis à vis de leur force.

Mais sans argent, l’illusion prend fin. Plus besoin d’esclaves s’il n’y a plus besoin de maîtres… si nous ne payons plus, nous supprimons d’un seul coup tout le poids de notre propre aliénation, et nous nous retrouvons alors face à nous-même, à nos propres responsabilités.  C’est d’ailleurs sans doute cela qui nous fait le plus peur : comme l’esclave libéré d’une trop longue emprise sur son corps et son esprit, l’homme libéré de l’argent est comme saisi d’un vertige. Il ne sait plus ni où aller, ni comment. Il lui faut réfléchir d’une autre manière, ne plus attendre des ordres, prendre des initiatives, en définitive reprendre en main sa destinée.

Mais qu’on le veuille ou non, c’est une question à laquelle l’homme est confronté, et à laquelle il va falloir qu’il réponde tôt ou tard : pour quoi, et pourquoi payer ? voulons-nous continuer à payer le prix de notre dépendance, ou nous libérer de celle-ci ? préférons-nous la servitude passive ou la liberté active ?

Si la deuxième proposition vous tente plus que la première, il serait grand temps de se mettre au travail. Ne pas avoir peur de la liberté, et laisser tomber les vieilles rengaines économiques, qui ne sont qu’une manière détournée d’accepter cet esclavage, sans en avoir l’air.

Et quand nous aurons tous bien compris pour quoi on paye, nous pourrons alors cesser de payer.

 

Caleb Irri

http://www.calebirri.unblog.fr

12 Réponses à “Pour quoi je paye ?”

  1. sruaux Dit :

    Merci pour ce billet qui est exactement mon sentiment … pourquoi je paye???

    Répondre

  2. Maria Sils Dit :

    La question qu’il faut diffuser (surtout à nos enfants ), c’est : comment crée-t-on l’argent et pourquoi l’état ne peut il créer son propre argent ? (cf loi Giscard de 1973 puis traité européen) .
    Une fois que l’imposture sera connue de la majorité , la révolution pourra enfin commencer et les citoyens annulerons la dette qu’ils doivent aux banksters .
    Je n’ai plus qu’un espoir , la révolte des jeunes générations contre le merdier que leur ont offert leurs aînés .

    Répondre

  3. Lisa Sion 2 Dit :

    En effet, Caleb, nous payons toujours autant d’impôts alors que bientôt tous les services seront privatisés…et donc, payants une seconde fois. Sans compter que les réformes ne servent qu’à boucher le trou fiscal béant créé par les niches qui permettent en plus aux plus riches de ne pratiquement plus payer d’impôts…C’est pour cette raison que l’État ne s’empresse pas de soutenir fiscalement les panneaux solaires, batteries dernières générations, vortex de cheminée et voitures électriques légères, tous ces progrès qui assureraient l’autonomie en local pour chaque utilisateur…Excellent billet à demain. L.S.

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  4. Danvhv Dit :

    Pour ce qui me concerne, ce papier est aussi mauvais que celui écrit il y a qqs semaines au sujet du « bonheur »…
    Une fois de plus, vous mélangez les plans entre l’argent et la manière dont certains l’utilisent… et la réflexion (ou ce qui se veut telle) est approximative, sans consistance, truffée de portes enfoncées et de lieux communs… sans parler de la conclusion, on ne peut plus mièvre et puérile…
    Ma proposition de réflexion: vous payez entre autres, pour ça: http://www.cadtm.org/La-monnaie-ce-lien-social-meconnu

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  5. calebirri Dit :

    @ Danvhv

    bonjour,

    je crois que vous ne parvenez pas à me comprendre, et ce pour des raisons bien normales, mais nous verrons cela après. j’entends bien votre point de vue, et j’aimerais que vous ayez raison : en admettant que l’argent puisse rester à sa place (un outil et non une fin), le plus logique consisterait à dire qu’il faut mettre assez de puissance « politique » pour le garder comme tel, par la mise en place d’une législation contraignante et pourquoi pas par une main-mise de l’Etat sur la création monétaire. mais cela, nos gouvernants, comme les économistes et les financiers, le savent aussi bien que vous. pourquoi, alors, ne le font-ils pas ?

    car justement ce n’est pas la loi qui fait le capitalisme, mais le capitalisme qui fait la loi. celui qui possède l’argent possède indirectement le pouvoir, comme vous pouvez le constater par les lobbies, la propriété des médias, et tous les autres nombreux liens de dépendance mutuelle qu’entretiennent le pouvoir politique et le pouvoir financier. car ce sont aujourd’hui les mêmes personnes qui dirigent et qui possèdent, car ceux qui possèdent sont arrivés au pouvoir politique ; et il est plus que certain qu’ils ne vont pas voter des lois qui les appauvrissent, n’est-ce pas ?

    vous pouvez imaginer qu’un gouvernement honnête et droit soit élu, il finira comme le président du Honduras Manuel Zelaya. tout simplement.

    pour moi, c’est l’argent le problème, celui qui tôt ou tard, par concentration de la richesse (plus on est riche, plus on s’enrichit), conduit aux dérives humaines, et aux chambres de compensation, aux paradis fiscaux, aux niches et aux boucliers fiscaux.

    alors vous pouvez trouver ça puéril de votre point de vue, mais pour ma part je trouve cela logique. mon avis est que, justement, c’est vous qui êtes dans l’erreur, car le conditionnement dans lequel vous êtes enfermé vous empêche de réaliser que la force du capitalisme va jusqu’à vous conditionner à ne croire qu’en lui.

    j’estime juste qu’il faut, pour régler les méfaits du capitalisme, se séparer de l’argent, car autrement tout recommencera toujours ainsi. il faut vous détacher de la double-pensée qui vous oppresse, pour que vous commenciez à entrevoir l’incohérence de votre raisonnement : la misère dans laquelle est plongée une bonne partie du monde n’est pas le fait de la méchanceté ou de la bêtise des hommes (il est là le lieu commun), mais le résultat d’un système qui nous contraint à laisser dans la pauvreté la majorité pour satisfaire une minorité, dont en plus vous ne faites peut-être pas partie.

    pourquoi continuer à nourrir un système qui nous affame ? la voilà la vraie question!

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  6. damien Dit :

    Bonjour,

    je suis bien de cet avis mais si on paye encore, c’est que « seul », nous sommes coincés; mais si 1 million d’individus (ou plus^^) ne payaient plus, alors nous pourrions faire bouger ce monde. Seulement « Mammon » est fort, son culte vieux, et les illusions qu’il procure sans fin, et au delà c’est la cupidité et l’avarice qui prédominent. Pas une mince affaire … :-)

    Répondre

  7. balthus Dit :

    L’esclavage, c’est fini! Cette fois, on a compris, ils ont dépassé les bornes et prennent vraiment les gens pour des cons!

    Caleb est un homme bon à qui il faut accorder sa confiance. Nous avons été créés pour être libres et heureux. Soyons libres et heureux.

    Retrouvons la confiance en la vie et soyons charitables envers les autres. Il faut agir ensemble pour notre bien. Demandons de l’aide au Créateur.

    Il exauce tous nos désirs, soyons patients et confiants.

    Savez-vous qu’il est possible de vivre sans douleurs? A tout âge, il suffit de sauter un, deux ou trois repas pour se maintenir en pleine forme.

    Et toute douleur disparaît après 3 jours sans manger, avec de l’eau. C’est une réalité de la vie. Le système de santé actuel est une vaste arnaque!

    Répondre

  8. calebirri Dit :

    @ Balthus

    je vous remercie pour votre enthousiasme, mais n’exagérez pas!

    le jeûne est une activité dangereuse pour qui n’y est pas formé. et pour ma part, en pleine forme, je mange quand j’ai faim, et c’est très bien comme ça…

    Répondre

  9. RV Dit :

    réaction à calebirri a dit:
    17 avril 2010 à 15:17 – @ Danvhv

    vous soutenez que « car justement ce n’est pas la loi qui fait le capitalisme, mais le capitalisme qui fait la loi »
    que dites vous alors des propositions du Front de Gauche de changer dans un premier temps la constitution (restitution de la démocratie) et de changer dans un deuxième temps ces fameuses lois ?
    Le constat que vous faites « le capitalisme fait la loi » omet de dire que les lois sont faites par les gouvernements et que si effectivement le raccourci que vous employez est vrai aujourd’hui c’est bien parce que les Etat sont gouvernés par des politiciens néolibéraux qui ont créé ces fameuses lois qui servent le « marché », changez les lois, le marché changera ! Exemple historique, les accords de Brettenwood et ceux de La Havane après guerre . . . Le cadre dans lequel évolue l’économie peut être changé à tout moment par la loi, encore faut-il une volonté politique . . . et à ce jour elle est dans le camps du Front de Gauche et nulle part ailleurs

    Répondre

  10. calebirri Dit :

    @ RV

    vous avez tout à fait raison, il faut changer les lois : c’est pourquoi nous travaillons actuellement sur le sujet, avec un « groupe de travail pour une Assemblée Constituante », que vous pouvez trouver ici : http://laconstituante.forumgratuit.fr

    Le Parti de Gauche propose également la mise en place d’une Assemblée Constituante, mais sans dire comment elle fonctionnera, ni comment elle sera mise en place « concrètement ». J’ai déjà posé la question plusieurs fois, mais n’ai jamais eu de réponse claire sur le sujet.
    Et cela de même pour tous les autres qui proposent cette Assemblée… n’hésitez pas à venir discuter avec nous !

    Répondre

  11. JM Dit :

    Si vous n’avez eu jamais eu de réponse claire de la part de ceux qui parlent de Constituante en France (à l’exception de Chouard je suppose qui exprime sans ambiguité son désir de tirage au sort – ça a au moins le mérite d’être honnête),
    c’est que tous (à ma connaissance en tout cas), absolument tous,
    sont des projets soit « sous marins » soit affichés émanant de partis politiques ou de groupes divers ne souhaitant pas quelquechose de trop différent que ce qu’ils veulent eux mêmes émerge d’une Constituante.

    La Démocratie et la véritable innovation politique ne sont pas leur fort, en d’autres termes…

    Répondre

  12. calebirri Dit :

    @ JM

    Bonsoir JM, c’est aussi (et malheureusement) ce que je pense…et c’est aussi la raison principale de mon engagement dans ce groupe de travail…

    à bientôt!

    Répondre

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